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Yuja Wang et les solistes du Berliner Philarmoniker jouent Brahms à Pleyel

Musique de chambre de Brahms à Pleyel hier soir, avec au programme la sonate pour clarinette N°2, le Trio pour piano et cordes N°3 et le quintette pour piano et cordes op. 34.

Beau concert, musique de chambre merveilleusement détaillée et lisible par de grands interprètes. La robe fourreau habituelle  de la  jeune et jolie Yuja Wang a changé de couleur à l’entracte, les autres musiciens sont moins photogéniques mais tout autant talentueux. Continuer la lecture de Yuja Wang et les solistes du Berliner Philarmoniker jouent Brahms à Pleyel

Nicolas Poussin : une peinture entre deux mondes

Nicolas Poussin, Eliezer et Rebecca, 1648, Paris

Nicolas Poussin, Eliezer et Rebecca, 1648, Paris, Musée du Louvre :

(Merci à Yves Rinaldi pour cet excellent billet)

Cette œuvre célèbre de Poussin est une commande du marchand lyonnais Nicolas Pointel qui avait demandé au peintre un tableau représentant de belles figures féminines. Poussin choisit cet épisode de l’Ancien Testament où le serviteur d’Isaac, Eliezer, propose à Rebecca d’épouser son maître et lui offre des bijoux en gage de la parole de celui-ci, parce qu’elle seule vient de lui proposer à boire. La scène, se déroulant comme une frise sculptée à l’antique, permet surtout au peintre de décrire les différentes réactions des jeunes femmes entourant Rebecca autour du puits, tout en leur faisant adopter des poses avantageuses qui mettent  en valeur leur plastique, sous de chastes drapés à l’antique. Il réalise ainsi le souhait de son commanditaire et se permet également de livrer une authentique étude psychologique de l’âme humaine, uniquement par le jeu des regards et la subtilité des expressions dépeintes.

Nicolas Poussin (1594-1665) : un normand devenu le « dieu de la peinture »

Etrange destinée que celle de ce peintre, né au hameau de Villers, près des Andelys, en Normandie et que rien de destinait par sa naissance à devenir ce « dieu de la peinture » selon l’expression d’André Félibien (1619-1695), ami du peintre et premier grand historien d’art français qui lui consacra un volume complet de ses Entretiens (Entretien VIII, 1685), première grande somme de l’histoire de l’art en France. Destin d’autant plus étrange que Poussin échappe à tous les critères habituellement applicables aux grands noms de la peinture. Il ne suscite en effet nul engouement de la part du grand public qui le boude, le jugeant pontifiant et ennuyeux, et son œuvre rebute quiconque serait en quête d’images spectaculaires et de sensations fortes, à l’instar d’un Caravage ou d’un Rembrandt, autres célébrités de la peinture du XVIIe siècle.
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Albert Herring, Britten, à  l’Opéra Comique

Tenir tout un opéra sur la nouvelle « Le rosier de madame Husson » de Maupassant est un tour de force, assez bien réussi par Britten. Bien sûr, l’histoire de ce jeune homme trop sage qui va décevoir le conformisme bêlant de son entourage est proche des intrigues d’autres opéras de Britten, Billy Budd en particulier. Britten « améliore » le personnage central qui, dans la nouvelle de Maupassant, se révèle simplement un irrécupérable poivrot. Je vous encourage à  relire cette nouvelle: on y remarque l’art de la digression, où comment Maupassant, sur une nouvelle courte, arrive à  passer la moitié des pages à  autre chose qu’à  raconter son histoire. La mise en scène est particulièrement remarquable. Elle rend l’action vraiment lisible, elle ne tombe pas dans la provocation ni le décalage ridicule. Ajoutons que les costumes sont, dans leur simplicité et banalité, très adaptés à  l’opéra. On reconnaît le caractère de chaque personnage à  sa façon de s’habiller;: le vicaire, le maire, l’institutrice… Seule petite faiblesse (à  mon goût): en laissant Albert Herring visible pendant que les autres le cherchent, à  la fin de l’opéra, la mise en scène annonce trop vite la chute et casse le dramatisme de la situation. On est ici plus dans la comédie de mœurs que dans la tragédie, de sorte que l’effet est plus faible que celui de Peter Grimes, le Viol de Lucrèce, Billy Budd ou le Tour d’écrou.
Comme d’habitude chez Britten, la musique n’est pas intrusive, elle illustre bien l’action mais sait se faire oublier. Ici, elle prend un tour franchement ironique par moments, en particulier durant l’acte I chez Lady Billows. Durant cet acte, des vidéos tournées par des élèves d’un BTS audiovisuel s’intégraient parfaitement à  l’action, illustrant tous les vices (vrais ou supposés) que la gouvernante a trouvés chez les jeunes personnes proposées au titre de Reine de Mai.
C’est Laurence Equilbey qui dirigeait, prouvant que son talent déborde du cadre de chef de choeur auquel on l’associe.
Yves Rinaldi