Elle s’avance à petit pas prudents vers le piano, moulée dans un long fourreau de couleur sombre fendue jusqu’à mi-cuisse, juchée sur d’incroyables chaussures à semelles compensées, une mèche blonde sur le coté, face au public, dans sa chevelure brune encadrant un joli minois de jeune chinoise bien sage.
Elle se meut comme une marionnette, sourire vaguement figée – elle salue en s’inclinant jusqu’au sol dans un mouvement rapide de poupée désarticulée, puis s’assoit sagement au piano, et là, par un coup de baguette magique, la marionnette incertaine devient dragon bondissant.
C’est bien elle, c’est elle, ce petit génie du piano qu’Emilie nous a déjà raconté, et qui nous avait donné l’envie de la voir en chair et en os et de l’entendre.
Le programme avait été modifié, pas de Ravel, et autres compositeurs français initialement prévus, mais personne ne s’en plaindra, qu’on en juge: De Sergueï Rachmaninov les Etude-tableau op. 39, n°6, Etude-tableau op. 39, n°4, l’Elégie op. 3, Etude-tableau op. 39, n°5; de Ludwig van Beethoven la Sonate n°13 op. 27 n°1 « Quasi una fantasia », d’Alexandre Scriabine la Sonate n°5 op. 53; et enfin de Franz Liszt la Sonate en si mineur. Deux heures de piano, suivies de cinq rappels et de cinq « extras » que l’artiste, infatigable nous offrira généreusement! Continuer la lecture de Yuja Wang à Pleyel