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Olivier Calmel, portrait d’un compositeur lauréat

Un long jeune homme à l’allure d’éternel étudiant entre derrière moi dans ce café de la place de la Nation où nous nous sommes donnés rendez-vous.

Ce que je préfère dans la vie ? Les jolies femmes !
Hum ! Avec cette affirmation souriante, Olivier voudrait donner le ton. Mais cet entretien de deux heures nous brosse le portrait d’un homme certes enjoué, mais réfléchi, résolu, passionné par son métier de compositeur, un brin romantique nous dit-il, bref… tout sauf un dilettante!

Dans la vie, j’ai un principe : je vais toujours jusqu’au bout de ce que j’entreprends.
Ça, avec cet air sérieux et décidé, on veut bien le croire  ! 🙂
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Le scherzo selon Jean-François Zygel

C’est en nous amusant, « scherzando » en italien (*) que JFZ nous a parlé vendredi dernier, à la Mairie du XXe de Paris du scherzo, cette forme musicale, pièce d’énergie et de caractère que l’on trouve habituellement en troisième partie de la forme sonate, mais qui peut constituer un morceau à lui tout seul, tel « L’apprenti sorcier » de Dukas.

Le scherzo, c’est comme le sandwich nous dit JFZ : du pain (le scherzo proprement dit), du jambon (le trio, intermède au ton plus doux), et du pain à nouveau.
Ce sandwich là se déguste sur un rythme à trois temps, plutôt vif, comme son ancêtre le menuet de Lully, même si Beethoven, pour se faire remarquer en a composé un à deux temps (op. 131) et Prokofiev un autre à quatre temps et Debussy à …5 temps.
L’histoire du scherzo, véritable tranche d’histoire de la musique s’étend sur deux siècles, en gros de Beethoven à nos jours. Avant, on trouve déjà un scherzo chez Haydn (Op. 33), mais il s’agit là d’une pièce « scherzando » (« pour rigoler ») plutôt que d’un vrai scherzo, comme le serait davantage son « menuet » opus 94 écrit 17 ans plus tard.
Mais la structure en sandwich ne rend pas compte de la véritable complexité de cette forme musicale, telle que l’a développée Beethoven, par exemple, le Roi du scherzo (plus de 100 scherzos à son répertoire).
Chaque tranche de pain se subdivise en effet en plusieurs parties plus ou moins symétriques qui interagissent en variant les thèmes, les nuances, les jeux de cadences, le rythme.
Dans la première période du scherzo, on répétait simplement le premier thème et on enchaînait sur un second thème, dans une forme de type AAB. Plus tard on va compliquer en doublant chaque partie, AABB.
Au XXe siècle, Franck et ses élèves, les Fauré, Debussy, Ravel multiplient les formes nouvelles. Ravel invente une nouvelle symétrie avec la structure A(A+B)A où¹ les thèmes A et B sont imbriqués sur plusieurs voix dans la partie centrale. Johan Alain va jusqu’à inventer la forme B, A, B (…?); Debussy complique les choses en introduisant des thèmes récurrents dans toutes les parties, y compris dans cet intermède qu’est le trio, pièce centrale de la forme scherzo, il invente le « scherzo variation » avec des rythmes à 5 temps joués en pizzicati.

Mais tout cela ne rend pas compte de l’essence même du scherzo, qui est d’exprimer l’humour, l’humeur et plus généralement les sentiments.
– L’humour avec des pièces qui empruntent au style du « landler »(**), cette pièce paysanne au rythme appuyé sur le premier temps. Exemple, Mozart: DO SI DO MI DO SOL MI FA RE LA SOL MI etc. ou Mahler dans sa 9e symphonie.
– L’humeur, parfois sombre, pesante de Beethoven, qui joue sur le matériau et l’opposition énergétique dans sa messe en Ut.
– Les sentiments qui résultent encore du travail sur le matériau de Schubert avec le scherzo de « La jeune fille et la mort » – dans une forme de type AABCAAD , où la partie scherzo est triste et le trio consolateur.
– Sans oublier les scherzos « grotesques » (à la fausse trivialité) de Chostakovitch (plus de 30 scherzos dans son œuvre), vulgaire au second degré, ou les scherzos fiévreux, haletants d’un Schumann dans ses quatuors sonates, ou encore le coté fluide et coloré des scherzos de Debussy ou Ravel, très espagnolisant.
Terminons en musique, comme dirait JFZ, avec cet extrait du scherzo op.61/1 du Songe d’une nuit d’été que Mendelssohn a écrit à 17 ans(***).
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(*), « C’est pour le fun » diraient les québécois, « c’est rock’nroll » disent certains français.
(**) C’est notre « contredanse », en français. JFZ a fait allemand première langue ! 🙂
(***) La 18e leçon de mes 20 Leçons d’harmonie donne plus de détails sur le scherzo et les formes de la musique savante.

Assez de foot, place à  la musique !

Faut-il continûment parler de Zidane pour avoir des visiteurs sur notre blog? Tant pis, oublions Zidane et ses excuses bidons, oublions les flonflons du 14 juillet et parlons musique, parlons des titres retenus pour notre concours permanent de composition, Foxdrop de Cyrus (non, ce n’est pas le pseudo de Zidane !) et Miles était dans la boite de SolCarlus (son vrai pseudo 😉 ).
Dans les deux cas il s’agit de pièces de jazz et non de classique, mais composées dans des styles très différents. Ceci justifie la décision très exceptionnelle du jury de retenir ces deux titres. Quel était le meilleur ? Voilà  ce qu’en disait rapidement notre américain Alex, en pleine bourre de fin d’année scolaire (depuis, peut-être a t-il fait sa rapide incursion en France pour randonner en notre Queyras ?) : (. . .)
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Comment trousser la chanson pour en faire un tube

A tous ces innocents qui composent des chansons pour devenir un jour riches et célèbres, Jean-François Zygel dans sa dernière leçon de musique livre ici, par mon entremise (un tantinet simplificatrice, je le concède) quelques recettes qui devraient constituer autant de clés du succês. 😉
Pour devenir immortelle, une chanson doit bien conjuguer ses quatre éléments: la mélodie, les paroles, un thème dans l’air du temps (c’est son aspect « social » qui fait qu’une chanson c’est autre chose que de la bonne musique) et un bon interprète! Et tout d’abord, foin d’ une idée reçue, il n’est pas nécessaire de composer les paroles d’abord et de les mettre en musique ensuite. Les exemples sont innombrables de chansons qui ont percées, depuis les chansons anciennes sur l’air de, (on disait « sur le timbre ») qui nous sont transmises depuis le 16e siêcle jusqu’à  celles d’un Norbert Glanzberg, bien obligé de composer sans les paroles puisqu’il ne parlait même pas le français quand il composa Padam, Padam, chanté par Edith Piaf.

Le secret ici? La mélodie. Pour qu’elle se retienne facilement, rien de tel que de jouer la simplicité en utilisant la symétrie et/ou la répétition de motifs mélodique ou rythmique dans le thème, par exemple quatre rondes suivies de quatre croches brèves, ou notes disposées par groupes (par exemple quatre plus trois, ou successions de notes égales, huit noires, etc), ces notes étant conjointes ou au contraire piquées (mais là, on rejoint l’interprétation). Et surtout garder une tessiture « humaine », ne jamais aller chercher les notes dans les aigus car les paroles seraient incompréhensibles (cf. les opéras!). Le rythme contribue également à la qualité de la mélodie. Sur un rythme de danse connue, la mélodie se retient mieux: le branle au 16e siêcle (deux pas à  droite, deux pas à  gauche!), la valse depuis Mozart (encore lui!) avec ses déclinaisons viennoises ( 2e temps anticipé), berlinoise (rythme très carré d’un Kurt Weill), musette, tango des familles, etc.

Les paroles ensuite. Qu’elle soient homophoniques ou en imitation (dans le cas de chorales), elles doivent rester compréhensibles et pour cela, trois règles doivent être respectées: (1) éviter les aigus, nous l’avons dit, (2) être syllabique, (3) respecter un débit récitatif imitant le langage parlé (cf. Arletty chantant « Mon homme »). Pour que votre chanson rencontre le succès, il lui faut un thème dans l’air du temps, l’amour étant bien sûr un thème éternel et donc réputé inusable. Enfin l’interprète: l’un fait le succès de l’autre. Evidemment quand la chanson est nouvelle, mieux vaut un interprète connu.