Archives de catégorie : Lyrique-Opéra

Lyrique et Opéra

Connaissez-vous « MIRRA » d ‘ALALEONA ?

(Notre rédacteur invité Yves Rinaldi signe cette chronique). « Mirra » est l’unique opéra du compositeur critique musical italien Domenico Alaleona (1881-1928). Créé le 30 mars 1920 à Rome, il fut salué comme un authentique chef d’œuvre par Puccini et Mascagni qui assistèrent à la représentation.

Myrrha poursuivie par son père est transformée en Myrthe

Injustement oublié depuis, cet opéra en deux actes a été ressuscité par un remarquable enregistrement public de Radio France en 2003.   Il a fait l’objet d’une édition (Chœur et Maîtrise de Radio France, Orchestre National de France sous la direction de Juraj Valcuha, Collection Radio France éditée chez Naïve).

Domenico Alaleona

LE DRAME D’UN AMOUR INCESTUEUX

Le livret de « Mirra » est tiré d’une pièce du dramaturge Vittorio Alfieri qui s’inspire de la légende grecque de la princesse crétoise Mirra coupable d’un amour incestueux pour son père et qui renonce au mariage à cause de cela. Suscitant opprobre et malheur autour d’elle, à l’aveu de sa passion incestueuse, elle se suicide avec l’épée de son père. Les dieux apitoyés (pour une fois !) la métamorphosent en un végétal qui porte son nom : la myrrhe.

UNE MUSIQUE A LA CONFLUENCE DE COURANTS DIVERS

L’intérêt musical de cet opéra assez court (1 heure 20) réside dans un style marqué par l’héritage vériste tempéré de Wagnérisme et de Debussysme. Loin d’être un patchwork hétéroclite, « Mirra » établit une synthèse authentique et surtout créative de ces esthétiques à priori antithétiques et difficilement conciliables. Alaleona adopte la trame de la mélodie continue instituée par Wagner et y insère, au gré de la dramaturgie du livret, des amorces d’arias tout à fait bien intégrées. Les trouvailles orchestrales sont nombreuses, l’orchestre jouant un rôle aussi important que le chant, comme le montrent la longueur de l’ouverture du Second Acte, ainsi que les plages instrumentales qui ponctuent l’œuvre. De nombreux motifs, véritables leitmotivs, structurent l’opéra de bout en bout. L’enregistrement de Radio France en 2003 révèle le talent de la soprano italienne Denia Mazzola dans le rôle titre. Sa voix intensément dramatique et puissante peut aussi se métamorphoser en plainte d’une douceur indicible lorsque son personnage ne peut avouer l’inavouable. Cette interprète se double d’une authentique tragédienne et le timbre chaleureux de sa voix laisse troublé quiconque écoutera cet opéra digne d’être hissé au rang des chefs d’œuvres lyriques d’un siècle qui n’en fut pourtant pas avare. Voici quatre courts extraits de cet opéra : Scène 1 de l’acte 1 : Scène 5 de l’acte 1 : Intermezzo : Scène finale acte 2 :

Les Pêcheurs de Perles : un chef d’ œuvre à  redécouvrir

(Notre rédacteur invité Yves Rinaldi signe cette chronique).

Créé le 30 septembre 1863 à l’Opéra Comique, « Les Pêcheurs de Perles » est un opéra en trois actes d’un jeune compositeur âgé d’à peine 25 ans : Georges Bizet. La France, lancée en pleine aventure coloniale, connaît une vague orientaliste dans les arts, juste retour de l’exploration et de la découverte d’autres horizons et d’autres cultures. On ne dira jamais assez combien les expositions universelles qui vont se succéder à partir du début de la décennie 1850 vont jouer un rôle décisif dans l’évolution des arts européens et français

notamment. 

Georges Bizet

Avec « Les Pêcheurs de Perles » dont l’action se situe au Sri-Lanka alors dénommé Ceylan, Bizet inaugure un genre qui connaîtra son apogée avec « Lakmé » (1883), célèbre opéra de Léo Delibes qui se déroule dans les Indes colonisées par les anglais. Les deux opéras ont en commun de jeter un regard nouveau sur le phénomène de l’intolérance religieuse – hindoue en l’occurrence -, hélas toujours d’actualité. Autant le texte mis en musique par Delibes en fait le moteur dramatique de son œuvre, autant pour les deux librettistes de Bizet, Michel Carré et Eugêne Cormon, l’interdit religieux articule l’action au second plan, l’amour et l’amitié demeurant les fils conducteurs de cet opéra. Le thême de l’intolérance religieuse n’était pas nouveau. L’opéra « La Juive » d’E-F.Halévy l’avait déjà  courageusement mis en scêne en 1834, suscitant l’admiration des plus grands compositeurs de l’époque, Berlioz et Wagner pour ne citer qu’eux. L’Opéra de Paris a eu la judicieuse idée de le reprogrammer cette saison derniêre, histoire de nous rappeler que « La Juive » fut un des plus grands succês de la scêne lyrique jusque dans les années 1930. Continuer la lecture de Les Pêcheurs de Perles : un chef d’ œuvre à  redécouvrir

REGINE CRESPIN EXCOMMUNIEE PAR LA « CULTURE MEDIATICO-PUBLICITAIRE »

(C’est Yves Rinaldi, rédacteur invité qui signe cette chronique)
Le silence assourdissant des grands médias, médias « grand public » autoproclamés, sur la disparition de Régine Crespin, illustre parfaitement l’état de déréliction intellectuelle dans laquelle la « culture médiatico-publicitaire » a plongé les esprits.

«Avec la mort de cette grande représentante de l’art lyrique, disparaît un des symboles les plus forts de l’excellence artistique» (Y.Rinaldi)

Depuis l’êre Jack Lang, c’est à  dire le début des années 80, la logique mercantile et médiatique s’est insidieusement insinué dans les plus hautes sphêres de la culture en France. Sous le fallacieux prétexte que la culture traditionnelle était devenue élitiste et surannée, le ministêre de la culture a voulu « dépoussiérer » la culture en l’infléchissant de deux façons :
par la légitimation économique et par l’événementiel .
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