daté du 6 janvier 2013
Un lycéen de 15 ans cosigne une recherche dans le magazine scientifique « Nature »
Neil Ibata a modélisé l’évolution des galaxies autour d’Andromède pour l’équipe de son père, astrophysicien au CNRS. L’article fait la « une ».
Pas banal de faire la « une » du magazine Nature à 15 ans ! Pas commun non plus de découvrir aussi jeune une donnée qui oblige à revoir la formation des galaxies, ou l’existence de la matière noire… Ce sont les deux aventures qui viennent d’arriver à Neil Ibata, un lycéen de Strasbourg. Cette semaine, il cosigne avec une équipe du CNRS un article sur Andromède, la galaxie géante la plus proche de nous. On la savait entourée d’un disque composé d’une multitude de galaxies naines. Neil a le premier montré que ces naines sont organisées en un disque aplati de plus d’un million d’années-lumière de long, en rotation sur lui même.
Son père, Rodrigo Ibata, est astrophysicien à l’Observatoire de Strasbourg. « J’ai fait un stage avec mon père pour apprendre un langage de programmation. La veille de la rentrée scolaire, le samedi midi, il m’a demandé si je voulais développer un programme qui permettrait de visualiser des positions et des vitesses de rotation qu’il avait calculées. C’était d’abord un exercice d’application de ce qu’il m’avait appris, rappelle Neil. Le lendemain soir, j’avais la solution. J’avais utilisé les vecteurs étudiés en cours en maths… Mon père, qui m’a guidé pendant ces deux jours, a observé comme moi que les galaxies naines étaient bien en rotation autour d’Andromède. »
Pas de eureka ! pourtant pour Neil. « Sur le moment, je n’ai pas mesuré l’ampleur de ma découverte. C’est l’équipe de mon père qui m’a expliqué toutes les implications de cette donnée nouvelle », rappelle l’adolescent au Monde.
Au lycée, le jeune homme n’a parlé de rien. « Sauf à mon professeur de maths, parce que j’avais utilisé des connaissances qu’on venait de voir » , raconte-t-il.
» Chance du débutant «
Neil est – on s’en doutait un peu – un bon élève, « intéressé depuis longtemps par les sciences », ajoute sa mère. « Même si je dois ma découverte à « la chance du débutant », cela me donne envie de faire de la recherche », confie-t-il. Il aime les mathématiques, un peu les étoiles, mais pense pourtant à une carrière de physicien. « L’astrophysique, c’est le domaine de mon père, ce ne serait pas bon d’être sur ses traces. Quant aux maths, j’aime bien, mais comme un outil. Je n’ai pas envie de faire des maths pour des maths », ajoute-t-il.
Neil n’envisage pas forcément un passage par les classes préparatoires. « J’ai plus envie de travailler en groupe sur des projets que de passer mon temps seul dans mes livres », estime-t-il à un an de son inscription dans l’enseignement supérieur. Lui qui voit jusqu’à Andromède n’a pas peur d’envisager « une université à l’étranger ».
En attendant, il travaille son piano trois heures par jour et va commencer à préparer le concours général en français et en latin. Pur intello, Neil Ibata ? Pas vraiment. ll aime aussi les balades à vélo, l’univers de Tolkien qu’il a maintes fois exploré avec Bilbo le Hobbit et Le Seigneur des anneaux. Quant au cinéma, il avoue un faible pour le western spaghetti…
Maryline Baumard