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TOSCA : Conflit et libération de l’Opéra à  l’aube du XXe siècle

(Yves Rinaldi, rédacteur invité est l’auteur de cette chronique)

Tosca va prochainement être donnée à  l’Opéra de Paris Bastille.

On ne peut que s’en réjouir, même si l’actuel directeur, Gérard Mortier, n’a jamais caché son aversion pour le vérisme. Mais Tosca figure parmi les plus grands chefs d’œuvres de l’art lyrique. C’est, de ce fait, un monument incontournable des programmations. Créé au Teatro Costanzi de Rome, le 14 janvier 1900, sous la direction de Toscanini, l’opéra de Puccini suscita une réaction déroutée de la part du public et aussi de la critique, tant l’œuvre rompait avec la formule qui avait assuré à  son auteur une place de premier ordre dans l’opéra européen avec Manon (1893) et surtout La Bohême (1896), laquelle, aprês un démarrage raté, était en train de conquérir triomphalement toutes les scênes du monde. Ce que l’on sait moins, c’est que la genêse de Tosca fut d’emblée marquée sous le sceau du conflit et des tensions entre le compositeur et ses librettistes Luigi Illica et Giuseppe Giacosa, tous deux auteurs du texte de La Bohême.
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Pavarotti, le fils du boulanger de Modène

 

Modène, il duomo (photo JLF)

(Extraits de l’article « Maintenant tu chantes devant Dieu » d’Annick Cojean, dans Le Monde daté du 11 septembre)

Panis Angelicus de Franck(Pavarotti et Sting lors d’un concert caritatif à  Modêne en 1992)

« Il est là , allongé, exposé, offert. Il est là  revêtu de son smoking des grands soirs, plastron et nœud papillon blancs, barbe et sourcils noirs de geai. Un léger sourire sur la bouche dont ne sortira plus aucun son.(…) deux voix d’homme s’élevèrent soudain pour chanter Panis Angelicus. Deux voix de ténor, profondes et denses, qui se répondaient, s’enlaçaient, se complétaient. Les yeux rivés sur le grand cercueil blanc couvert de tournesols, l’assistance tendait l’oreille, incrédule. Pavarotti chantait. Pavarotti emplissait la cathédrale. L’enregistrement datait de quelques années et n’était pas parfait, mais le ténor le chérissait entre tous : un duo avec son pêre, le boulanger à  la voix d’or, ici même, à  Modène.

 

Le boléro d’Arvieux en Queyras

Oh, magie de l’œuvre universellement connue de Monsieur Ravel… 🙂
Ecoutez ce dialogue :
Que fais-tu demain?
Demain, je vais au Boléro, à  Arvieux ! Tu y vas?

C’est ainsi que les Queyrassins s’interpellaient pour se donner rendez-vous, là -haut, dans les alpages de « Pra-Premier » en ce samedi 14 juillet 2007, la veille de l’évênement.


Avant le plus haut concert d’Europe

(En bas à  gauche, le violoncelliste, petit fils d’André Bourgues grâce auquel le concert fut organisé : merci à  lui !)

Car, en Queyras, l’évènement n’était pas le 14 juillet, mais le 15… Le concert le plus haut d’Europe!
Pensez, réunir plus de 2000 personnes dans un pays qui n’en compte guère plus de 3000 ! Et surtout en pleine montagne, à  2050 m d’altitude, dans un grand amphithéâtre naturel accessible par un sentier et une mauvaise route forestière de quelques kilomètres, dans le seul terrain plat de cette commune d’Arvieux, bien connue du Tour de France puisqu’elle compte le Col de l’Izoard dans son paysage.

« Tout a commencé par un rêve » nous dira l’organisateur, dans un brillant et émouvant discours d’ouverture, un rêve auquel les technocrates en charge du financement de la culture dans les Hautes Alpes ne croyaient pas vraiment. C’était le rêve d’un vieux Monsieur nommé André Bourgues, poète et paysan du QUEYRAS, passant par là  et s’adressant à  son petit fils, futur violoncelliste. Voici ce rêve, en forme de programme :

Nous avons rêvé des Cors des Alpes se répondant en écho, nous avons rêvé de l’Orchestre Lyrique de région Avignon Provence, dirigé par un chef prestigieux de renom international Hikotaro Yazaki, et accompagné des professeurs et élèves du Conservatoire du Grand Avignon. Nous avons rêvé d’un public nombreux, dans un prairie éclaboussée de soleil, de marmottes s’abstenant de siffler, de chamois médusés cessant un instant de brouter, d’aigles suspendant leur vol pour mieux entendre les échos des cuivres et des bois. Nous avons rêvé de Ravel et de Fauré, de boléro valsé et de pavane élégiaque…

Pensez, déplacer un orchestre symphonique entier et surtout organiser un rassemblement de plus de 2000 personnes en pleine montagne, il fallait y croire !
Ils y ont cru , et ils ont eu raison. Nous avons même vu trois aigles planer au dessus de nos têtes pendant que l’orchestre nous jouait l’Elégie pour violoncelle et orchestre de Gabriel Fauré !
Voici deux petites vidéos sans prétention de cet événement qui enchanta nos vacances cette année, en Queyras.

Bolero par gilleslf


Cors des Alpes par J-Louis Foucart

Extrait du concert « le plus haut d’Europe 15 juillet 2007 à  Arvieux en Queyras

Connaissez-vous « MIRRA » d ‘ALALEONA ?

(Notre rédacteur invité Yves Rinaldi signe cette chronique). « Mirra » est l’unique opéra du compositeur critique musical italien Domenico Alaleona (1881-1928). Créé le 30 mars 1920 à Rome, il fut salué comme un authentique chef d’œuvre par Puccini et Mascagni qui assistèrent à la représentation.

Myrrha poursuivie par son père est transformée en Myrthe

Injustement oublié depuis, cet opéra en deux actes a été ressuscité par un remarquable enregistrement public de Radio France en 2003.   Il a fait l’objet d’une édition (Chœur et Maîtrise de Radio France, Orchestre National de France sous la direction de Juraj Valcuha, Collection Radio France éditée chez Naïve).

Domenico Alaleona

LE DRAME D’UN AMOUR INCESTUEUX

Le livret de « Mirra » est tiré d’une pièce du dramaturge Vittorio Alfieri qui s’inspire de la légende grecque de la princesse crétoise Mirra coupable d’un amour incestueux pour son père et qui renonce au mariage à cause de cela. Suscitant opprobre et malheur autour d’elle, à l’aveu de sa passion incestueuse, elle se suicide avec l’épée de son père. Les dieux apitoyés (pour une fois !) la métamorphosent en un végétal qui porte son nom : la myrrhe.

UNE MUSIQUE A LA CONFLUENCE DE COURANTS DIVERS

L’intérêt musical de cet opéra assez court (1 heure 20) réside dans un style marqué par l’héritage vériste tempéré de Wagnérisme et de Debussysme. Loin d’être un patchwork hétéroclite, « Mirra » établit une synthèse authentique et surtout créative de ces esthétiques à priori antithétiques et difficilement conciliables. Alaleona adopte la trame de la mélodie continue instituée par Wagner et y insère, au gré de la dramaturgie du livret, des amorces d’arias tout à fait bien intégrées. Les trouvailles orchestrales sont nombreuses, l’orchestre jouant un rôle aussi important que le chant, comme le montrent la longueur de l’ouverture du Second Acte, ainsi que les plages instrumentales qui ponctuent l’œuvre. De nombreux motifs, véritables leitmotivs, structurent l’opéra de bout en bout. L’enregistrement de Radio France en 2003 révèle le talent de la soprano italienne Denia Mazzola dans le rôle titre. Sa voix intensément dramatique et puissante peut aussi se métamorphoser en plainte d’une douceur indicible lorsque son personnage ne peut avouer l’inavouable. Cette interprète se double d’une authentique tragédienne et le timbre chaleureux de sa voix laisse troublé quiconque écoutera cet opéra digne d’être hissé au rang des chefs d’œuvres lyriques d’un siècle qui n’en fut pourtant pas avare. Voici quatre courts extraits de cet opéra : Scène 1 de l’acte 1 : Scène 5 de l’acte 1 : Intermezzo : Scène finale acte 2 :