« La description du plaisir féminin par Lawrence est incroyablement vraie ! Venant d’un homme, c’est surprenant ». Ce témoignage de Catherine Millet avait piqué ma curiosité (voir son interview ici 🙂
Pour moi qui aie beaucoup lu les écrivains de l’entre-deux-guerres, ce livre ne m’avait étonnamment jamais attiré.
Je l’ai donc acheté, l’ai lu… Et j’avoue qu’il a failli plusieurs fois me tomber des mains au début : une intrigue un peu maigre avec beaucoup de digressions, un style très familier, voire cru, souvent boursouflé, un peu daté.
Alors, finalement, livre porno ou simple roman de gare à l’érotisme à l’eau de rose ? Ou bien chef d’œuvre de la littérature anglaise, comme le Ulysse de James Joyce, de la même époque ?
Pour résumer cette belle histoire d’amour : Constance, une belle jeune femme épouse d’un nobliaux devenu impuissant après une blessure de guerre s’ennuie à mourir dans son vilain château des Midlands, région agricole envahie par l’exploitation des mines de Charbon de l’ère industrielle. Presque par hasard, elle fait connaissance du garde chasse du château (attention, pas n’importe quel garde chasse ! Celui-là, c’est un bon coup (de rein !) et bien que prolétaire, par son éducation il est digne de la Milady !) Il lui fait un gosse et le récit se terminera peut-être bien s’ils continuent de s’aimer dans le dernier lieu épargné par la lèpre industrielle des usines et des mines en ce début du XXe siècle anglais.
L’intrigue est mince, mais elle est menée diaboliquement pour fait monter la tension du lecteur, du fait notamment des longues incises sur la sexualité, des réflexions vaguement anarchistes de l’auteur qu’il prête à ses protagonistes sur cette vilaine société de classes ou l’argent est roi, au point qu’à un moment de ma lecture je suis allé directement à la fin pour connaître le dénouement et pouvoir reprendre une lecture plus sereine… Ce qui démontre finalement qu’il s’agit là d’un grand bouquin.
Car l’intellectualité, la dimension physique et affective, la vie involontaire sous forme de pulsions sexuelles et d’inconsciente volonté de destruction multiplient le questionnement sur ce récit.
Et la dimension poétique, la défense d’une sexualité libérée qui s’accorde avec l’exaltation de la beauté de la nature sont les ingrédients d’un romantisme écologique étrangement moderne.