Hier soir, Peter Eötvös remplaçait Pierre Boulez (hospitalisé aux Etats-Unis) à la tête de l’Ensemble Modern Orchestra, une formation allemande spécialisée dans la musique contemporaine.
La salle ne faisait pas le plein, bien que le tarif soit sensiblement moins élevé qu’habituellement. Absence de Boulez?
Le programme comportait cinq œuvres dont deux de Schonberg, autour d’un thème, l’expressionnisme et il faisait la part belle à trois créations de jeunes compositeurs, Bruno Mantovani, Jens Joneleit et Johannes Maria Staud.
Johannes Maria Staud, compositeur vedette de la soirée.
L’expressionnisme est un mouvement artistique germanique qui s’est révélé par la radicalisation du romantisme nous dit le programme qui ajoute : Schonberg n’a cessé d’être cette « main heureuse » du créateur qui questionne l’expression par le langage : peinture, musique, écriture. Schonberg avait pour principe esthétique de « laisser l’auditeur complètement libre de réagir à l’expression musicale pure et simple ». Autrement dit, il souhaitait qu’on écoute sa musique sans demander d’explication. Sur ce point, ses jeunes émules ne le suivent pas et il est vrai qu’ils n’ont pas tort, car leurs musique ne se laissent guère apprivoiser, au moins pour les deux premières créations, Postludium et Dithyrambes.
Postludium, première œuvre du programme, est une création de Bruno Mantovani, 36 ans, nouveau Directeur du Conservatoire National de Musique et de Danse de Paris. La pièce débute brutalement par un « chaos » musical insupportable, « issu de la dernière scène chantée de l’opéra Akmatova » nous dit le programme. Cette pièce est une sorte de « postlude » de cet opéra écrit sur l’histoire tragique d’une femme. Voilà un charivari orchestral, une musique de sourds qui ne nous donne guère envie d’aller voir cet opéra. Elle se poursuit avec des frissonnements de violons ponctués de grands coups de cuivres et de cymbales, avec quelques rares moments apaisés où¹ l’on entend l’accordéoniste de service. Les cordes sont toujours à la peine mais généralement inaudibles, à la différence des quatre percussionnistes qui nous assomment sans faiblir. Au bout de 14 minutes, l’orchestre se tait et la salle applaudit poliment.
Dithyrambe nous dit le programme « est une œuvre foisonnante, quasi expérimentale » du Berlinois Jens Joneleit. « C’est le résultat d’une acte spontané chez Joneleit, une rage d’écrire ». Une rage d’écrire spontanée Pourquoi pas ? 😉
En fait ce sont de longues séquences de petits cris et chuchotements des cordes et des bois qui s’avèrent rapidement monotones, ponctuées par des notes aigues du piano et du vibraphone. Au bout de 12 minutes l’orchestre conclut dans une sorte de trémoussement électrique intéressant, mais pas vraiment convaincant. Viennent ensuite les Cinq pièces pour orchestre, opus 16 de Schonberg. Ces piécettes écrites en mai-aout 1909, bien avant que Schonberg n’invente le dodécaphonisme sont superbes, d’une élégance élégiaque, d’une grande délicatesse, « une succession chatoyante et ininterrompue de couleurs, de rythmes et d’atmosphère ». Schonberg ne joue pas dans la même cour que les précédents, dira cruellement ma voisine à l’entracte. La deuxième partie du concert nous permet de découvrir Contrebande, une œuvre magistrale de Johannes Maria Staud, né le 17aout 1974 à Innsbruck. A son sujet, le programme nous dit sobrement que » Johannes Maria Staud s’exprime peu si ce n’est pour faire découvrir – et partager – l’œuvre de Bruno Schulz » qui l’a inspiré. J’ajouterais que point n’est besoin de connaître les écrits de Bruno Schulz pour apprécier cette musique raffinée. Elle parle toute seule ! Elle débute dans un style qui rappelle les viennois célèbres, et nous plonge pendant 16 minutes dans une atmosphère onirique, un monde intemporel avec de magnifiques effets sonores de décrescendos aux cordes, de glissandos de trombones qui nous conduisent vers un climax incandescent pour se prolonger par de longues notes tenues des instruments, avec, à la fin, de surprenants effets de résonances entre les divers instruments, celesta, piano, cordes harpes, cors, cuivres et percussions. Cette pièce sera très applaudie par un public conquis, face à un jeune compositeur qui viendra saluer timidement. Pour finir, Les variations pour orchestre, opus 31 de Schonberg. Cette œuvre marque le début de sa période sérielle. De fait, cette conjugaison de motifs entrelacés, chef d’œuvre d’ingénierie musicale et sonore de 20 minutes s’avère agréable à écouter bien qu’un peu hachée, puis elle devient monotone. Ecrite en 1928, elle nous parait paradoxalement plus « datée » que l’œuvre précédente de 1909. Le concert se termine avec trois rappels pour l’orchestre et son chef, Pierre Boulez Peter Eötvös.
MAL AUX OREILLES ? QUE FAIRE ?
Tous les musiciens, mélomanes et pros devraient protéger leurs oreilles :
Prévenir les risques
Plusieurs astuces permettent, lorsqu’on est souvent exposé au bruit, de réduire l’impact des nuisances sonores :
– se mettre au calme un peu chaque jour pour reposer ses oreilles ;
– réduire le temps passé à écouter de la musique, notamment au casque
– écouter au casque à un faible volume ;
– ne pas passer ses soirées au téléphone ;
– lorsqu’on va écouter un concert : se protéger les oreilles avec des boules Quiès ou mieux, des filtres (ils ont l’avantage de ne pas couper les fréquences et donc de ne pas dénaturer les équilibres sonores) ;
– anticiper le plus qu’on peut les bruits pour « prévenir » l’oreille : une oreille avertie en vaut deux, et soyez sûr qu’elle souffrira beaucoup moins si elle est prévenue de ce qui va arriver ;
– ne pas hésiter à se boucher les oreilles lorsqu’on traverse une rue en travaux ou qu’on entend un métro arriver.
Extrait de : medecine-generale.suite10…
CIt. JLF : Non, le compositeur est un artiste qui compose avec ses valeurs propres, valeurs qu’il s’est appropriées ou qu’il s’est forgées. »
-Oui bien sûr, ceci dans le meilleur des cas;cependant personne ne compose » ex nihilo « ; Les « valeurs propres » ne le sont jamais entièrement, la preuve : on englobe beaucoup de compositeurs dans des » courants musicaux « , voire des époques entières. Ce qui ne contredit pas le fait que chaque artiste puisse garder sa personnalité et l’exprimer dans ses œuvres.
Quant au fait de » composer gentiment « , il relève aussi de » l’esthétique »
( celle-ci étant liée de toute façon à l’éthique) et il est bien éloigné de toute réflexion subjective !
créer une musique « aimable », consciemment ou non, c’est s’inscrire dans une esthétique bien particulière.
. Il n’y a pas de jugement de valeur là dedans. ¦Peut on reprocher à un compositeur de vouloir plaire, [Mozart, – désolée de citer cet exemple ressassé,- cherchant des » notes qui s’aiment « , selon ses propres mots. Elles ont eu parfois l’amour vache , ces notes en s’affrontant dans le quatuor des dissonances , dans Don juan ou dans un certain Adagio et Fugue]
Une romance d’aujourd’hui écrite en sol mineur, ou mieux en si b mineur , enrichie de thèmes langoureux, faciles à mémoriser aura du succès à coup sûr, et surtout si la pièce est confiée à des interprètes aux sonorités veloutéesâ; Personne n’écrit » atonal » dans le monde de la musique grand public, â; ou cela m’a échappéâ;les orchestrations n’y sont jamais tellement sophistiquées, quant à la notion de concept musical elle est absente.
La musique » plein les oreilles » n’est pas forcément agréable, à moins d’être fou de rock , quoique certains tutti de l’orchestre classique ne soient pas en reste dans la course aux décibels. Certains compositeurs sont mêmes réputés dangereux auprès des musiciens d’orchestre ( Beethoven, Bruckner, Berlioz ?) dans leur démesureâ;.
On oublie souvent la notion de « confort d’écoute » tout simplement, au-delà duquel l’auditeur risque se sentir écrasé voire agressé. Les premiers rangs dans les salles de concert , les fauteuils d’orchestre ne sont pas forcément les plus confortables d’un point de vue acoustique…
Les musiciens (les cordes par exemple ) placés à proximité des percussions ou des cuivres se protègent des effets sonores soudains et nocifs. D’où¹ l’importance aussi des dispositions orchestre/ salle /public.
p>Emilie : « Finalement un compositeur n’a t-il pas tout intérêt à composer « gentiment »
Hum… Composer « gentiment » plutôt que « méchamment » relève de l’éthique plus que de l’esthétique et c’est une nouvelle grille d’analyse bien subjective !
Personnellement je préfère revenir du concert avec de la musique « plein la tête » plutôt que « plein les oreilles ».
On peut être mélomane sans être masochiste. 🙂
« et en se référant aux valeurs sûres du passé ? »
… ou a contrario en créant les valeurs sûres de l’avenir? Non, le compositeur est un artiste qui compose avec ses valeurs propres, valeurs qu’il s’est appropriées ou qu’il s’est forgées. Que cela plaise ou non est une autre affaire. Qu’il recherche l’applaudimètre lors d’un concert est une évidence.
Cette description vivante , enjouée et parfois grinçante m’a beaucoup plu ! En tous cas cela me donne envie de découvrir le deuxième opéra de l’excellent Bruno Mantovani !
On en parle ici : saison10-11.operadeparis….
cliquer en bas sur « opéra » puis sur la vidéo correspondante à « Akhmatova »
Akhmatova est d’ailleurs « un grand poète », en fait elle est La grande dame de la littérature russe du XX e siècle voici une présentation sur le site « Esprits Nomades » :
http://www.espritsnomades.com/si...
EN 2010 , et à côté des autres œuvres présentées ce soir là ,
( sauf l’œuvre raffinée de « Johannes Maria Staud » appréciée de tous ) l’ opus 16 de Schoenberg fait presqu’ office de friandise au rayon » Bach-Vivaldi » …
Finalement un compositeur n’a t-il pas tout intérêt à composer « gentiment » et en se référant aux valeurs sà»res du passé ?
Tout dépend de ses motivations: Musique ? Applaudimètre ? Provocation ?