Soirée Haendel hier sur Arte avec « Le Messie », son oratorio anglais le plus fameux, suivi d’un excellent documentaire sur ce génie protéiforme de la musique baroque, précoce virtuose de l’orgue dans sa Saxe natale, puis globe trotteur bon vivant faisant ses classes en Italie avant de s’installer définitivement à Londres où¹ il prend la nationalité anglaise. Il y finit aveugle, aprês 36 ans d’activité intense; ne composant plus mais improvisant toujours à l’orgue aprês s’être montré un homme d’affaires inventif et un entrepreneur de spectacle à succês, le contraire d’un Jean-Sébastien Bach, son exact contemporain. Le spectacle fut filmé le 1er avril au Théatre an der Wien, avec l’ensemble Mattheus, le choeur Arnlod Schoenberg dirigé par Jean-Claude Spinosi et les solistes Bejun Mehta, contre-ténor, Cornelia Horak, soprano, Florian Boesch, Baryton, Richard Croft, et surtout Susan Gritton, magnifique soprano. Le Messie porte à la scêne un épisode de l’histoire sainte, d’aprês le livre prophétique d’Esaà¯e : la vie et la mort de Jésus, jusqu’au retour du Christ le jour du Jugement dernier. L’ouvrage est découpé en trois actes (l’Avent et la Nativité, la Passion, la Bonne Nouvelle), sur un livret issu de la Bible, compilé par Charles Jennens. Cet oratorio de trois heures, Haendel le composa entre le 22 août et le 14 septembre 1741. Vingt quatre (24) jours. Incroyable ! Il semble que son mode de composition était proche de l’improvisation, ce qui explique à la fois les três nombreux emprunts, réemplois et réécritures dans ses œuvres et sa capacité à écrire vite des mélodies três chantantes, três appréciées de ses interprêtes. Cet Oratorio ne comporte pas d’action stricto sensu. Jésus n’apparaît pas, l’essentiel étant de prouver qu’il est bien le messie que l’Ancien Testament avait annoncé. Le librettiste Jessens enchaîne de courtes citations liées par plusieurs niveaux de sens dans une constante progression du récit. Le Messie n’est pas un personnage dramatique, il est évoqué par allusions, analogies ou commentaires dans des textes solennels ou imagés, se prêtant bien aux illustrations musicales auxquelles Haendel excellait. Est-ce parce que justement, il n’y a pas d’action que le metteur en scêne, Claus Guth, craignant que l’on s’ennuie, s’est senti obligé de nous servir cette mise en scêne incroyablement foldingue, terriblement théà¢trale? Il parait que c’est une premiêre dans la représentation d’un oratorio. Mais jugez plutôt.
L’œuvre débute par une ouverture à la française; elle sert de prétexte au metteur en scêne pour faire évoluer une charmante créature s’exprimant en un gracieux langage des signes. Pourquoi pas? Cette créature reviendra en plusieurs occasions, déguisée en femme de ménage en contrepoint d’un ténor qui chante la douleur du Christ, ou d’une soprano criant le désespoir de la Vierge Mêre
Cette créature est évidemment muette, tout comme le danseur-acrobate-mime qui évoquera l’humiliation du Christ en homme d’affaire glabre, grosse serviette de cuir noir à la main arrivant en réunion pour se retrouver en butte aux sarcasmes de ses supérieurs et collêgues; ou flagellé sur son chemin de croix; ou dans sa chambre à coucher, mort ensanglanté aprês s’être ouvert les veines; ou reposant dans son cercueil avec sa photo jaunie collée sur le cercueil en début et en fin du spectacle, l’entre-deux n’étant qu’un long flash back… Est-ce beau? Oui, parfois. Saisissant, surprenant? Certainement. C’est surtout três théà¢tral – Haendel aurait probablement aimé. Parfois réjouissant, comme cette scêne du couple qui s’ébat sur son lit, se caressant mutuellement les pieds tout en chantant en duo le fameux air des pieds (« How beautiful are the feet! ») pour exalter la bonne nouvelle de la résurrection du Christ ! Mais cette mise en scêne est parfois lourde, et surtout elle a le défaut de nous faire oublier la musique, parfois, et c’est dommage. Mais ne boudons pas notre plaisir. Pour fêter le 250e anniversaire de Haendel, la seule chaîne de télévision s’appelle Arte qui ose nous proposer à une heure de grande écoute une œuvre de trois heures, chef d’œuvre de la musique baroque dont les mélomanes ne connaissent en général que le fameux « Halleluja ». Merci ARTE ! Voici une interprétation de l’alleluia dans une formation ou l’on retouvait justement la sopranissime Susan Griton. Mais ici, seuls le choeur, les cordes, les trompettes et les cymbales sont en scêne.
Rédiger un article ?…Heureuse occupation Jean-Armand, tu as fais le bon choix !
tu mets le verbe broncher entre guillemets, tu as raison, c’est un drôle de verbe (Vous bronchà¢tes, que vous bronchassiez, que vous eà»tes bronché ! nous bronchions, bronchez!)
amicalement toooo…
Emilie
Bonjour Emilie,
Je n’ai pas "bronché" parce que hier soir j’étais occupé à rédiger… un article pour le blog. Je n’ai pas lu ton commentaire.
Amicalement,
Jean-Armand
Oh ! désolée JLF , je me suis trompée de prénom ! …(et JAM qui ne bronche même pas)
oui j’ai bien compris que la mise en scène se voulait dérangeante, c’est difficile en art de déranger sans tomber dans le ridicule ou le mauvais goût… tout est question de nuances, et bien des fois c’est l’humour qui sauve…
Merci Mr "Jean-Louis" F. ( et non Jean-chose ) encore pour ce compte -rendu !
Emilie
Le point d’exclamation que tu soulignes dans ma prose, Emilie, ne réfère pas au chant lui-même ("How Beautiful are the Feet…") mais à la mise en scène qui l’illustre.
On peut voir cette illustration au 1er degré: les deux protagonistes se réjouissent de la bonne nouvelle dans une scène que l’on peut juger avec quelque indulgence comme "légèrement grivoise". Ou, au contraire, que l’on situera plus sévèrement au 3e degré du mauvais goût… 🙂
Ce qui est clair, c’est que du point de vue du metteur en scène, il fallait qu’elle "dérange" !
Et de mon point de vue de spectateur et mélomane, cette mise en scène a globalement le défaut de ne pas assez respecter la musique, même si elle est intéressante.
Jean-Chose
merci Jean-Armand pour ce compte-rendu, Arte devrait laisser sur son site plus longtemps de telles émissions…
tu mets des points d’exclamation après " How beautiful are the feet ", mais c’est vrai que ces paroles séparées de leur contexte paraissent étranges…
(La mise en scène que tu décris bien, m’a l’air un peu loufoque, il y a peut être eu confusion avec une danse de …passepied ? )
Les versets de la Bible que Haà«ndel a magnifiquement mis en musique et que tout le monde connaît sont en anglais :
How Beautiful are the Feet of those who bring good news, proclaim peace, bring glad tidings of good things, proclaim salvation, and proclaim to Zion, "Your God reigns!"
(Isaà¯e 52-7)
quelques versions ici plutôt belles ( mais sans Susan Griton )
http://www.youtube.com/watch?v=4...
http://www.youtube.com/watch?v=I...
et Par Jeffrey Osborne : http://www.youtube.com/watch?v=X...
texte in french :
Is 52:7-Qu’ils sont beaux, sur les montagnes, les pieds du messager qui annonce la paix, du messager de bonnes nouvelles qui annonce le salut, qui dit à Sion : " Ton Dieu règne. "