L’Orchestre de Paris nous proposait hier soir un programme éclectique, sous la baguette de son chef Paavo Järvi avec le concours du pianiste suisse Andreas Haefliger.
Au programme, donc, Le Tombeau de Couperin en version orchestre de Maurice Ravel, le Concerto N°24 de Mozart, et une création mondiale, La Vie antérieure pour piano et orchestre de Karol Beffa. Après l’entracte, Le sacre du Printemps de Stravinski.
A noter que ces deux dernières pièces étaient les vraies vedettes de ce concert, bien que la pièce de Ravel soit toujours aussi plaisante à écouter. Quant au concerto de Mozart, il était déjà au catalogue du pianiste et permettait de compléter le programme et de l’équilibrer pour faire plaisir aux vieilles dames du premier rang… Je n’en dirai rien – d’ailleurs je me suis assoupi deux fois pendant ces trente minutes de musique Mozartienne (*)…
J’ai beaucoup aimé le velours des violons du Prélude du Tombeau. L’orchestre s’est montré à son meilleur dans cette pièce de Ravel que j’adore, surtout dans les mouvements lents et mélancoliques.
La pièce de Karol Beffa a été pour moi une révélation. C’est un compositeur très « français », dans la lignée, d’un Ravel, d’un Koechlin, d’un Sauguet ou d’un Dutilleux (dont il se recommande). Sa musique est d’un abord relativement facile. Qu’elle soit joyeuse et légère ou mélancolique, elle est toujours profonde et lumineuse, toujours belle, même si l’art du compositeur s’avère complexe – mais Sauguet, justement, ne disait-il pas : « Seules les âmes vaniteuses et froides confondent le compliqué, le difficile avec le beau »?
L’homme est simple, sympathique, quand on lit ce qu’il écrit, quand on l’écoute à la radio. La journaliste lui demandait récemment ce qu’il pensait de l’action pédagogique de Jean-François Zygel dans les médias. Réponse en forme de coup de fusil : « C’est un personnage insupportable de prétention et de vanité, un cabotin ». Jugement sévère, curieux aussi quand on compare leurs biographies : Tous deux sont compositeurs et brillants improvisateurs, sortis du Conservatoire Supérieur de Musique de Paris, Zygel avec 10 premiers prix et Beffa avec seulement huit, mais ce dernier se rattrape comme ancien élève reçu premier à l’Ecole normale supérieure de la rue d’Ulm, puis à l’ENSAE (une école d’application que l’on intègre en général après Polytechnique), un Master de Philosophie à Cambridge et une agrégation de musicologie, excusez du peu… Tous deux enseignent, le premier au CNSM, le second à la Sorbonne et à l’Ecole Polytechnique; ils sont issus de la grande bourgeoisie – Papa Oncle Beffa fut PDG du Groupe Saint Gobain pendant de nombreuses années. Et même si l’un juge l’autre cabotin (ce qui est incontestable), on lit dans sa bio qu’il fut « enfant acteur entre 7 et 12 ans dans plus d’une dizaine de films ». Une telle carrière vaut-elle les grandes messes d’un Zygel bateleur, au Chatelet ? Pas sûr, surtout si l’on écoute Karol Beffa lire sa leçon inaugurale au Collège de France : Manifestement, l’un très extraverti, l’autre pondéré et sage, ils ne sont pas faits du même bois.
Mais revenons au concert.
La deuxième partie était consacré au fameux Sacre de Stravinski. Il date des années 1910-1913 et il est presque aussi connu que le Boléro de Ravel. Qui n’aime pas cette musique de ballet? Toujours aussi impressionnante, et elle le fut, hier soir, comme elle l’était en 2007, il suffisait d’entendre les acclamations de la salle à l’issue du concert.
Ce concert était télévisé et sera visible Medici.tv et sur le site de l’Orchestre.
(*) Je sais, cela devient une mauvaise habitude !
Karol Beffa n’est pas le fils de l’ancien pdg de st Gobain mais son neveu , et certainement pas issu de la grande bourgeoisie ( parents profs).
(JLF=>Merci pour cette rectification)
excellent billet JLF bravo ! j’ai appris beaucoup de choses outre que Mozart peut s’avérer être un excellent somnifère, que Zygel est peut-être légèrement cabotin, et que Beffa excellent compositeur aurait une grosse tête ( bien faite) bon heureusement que la musique réunit tout ce beau monde …
Personne n’arrive à la cheville du Maestro ZYgel, dispensateur généreux et passionnant d’un savoir incroyable, les polytechnicien ou les savants de la rue d’ulm ont d’autres qualités.