« Ah, vous composez, vous aussi » ! C’est le titre de notre concours permanent de composition ; si vous êtes compositeur, cette phrase est aussi le prélude à une question que vous vous êtes inévitablement posée : « dois-je protéger les musiques dont je suis l’auteur ? ».
Reprenons les deux aspects de la question.
Quel est votre but ?
Est-ce vous faire plaisir et faire plaisir à autrui en exprimant avec des notes ce que vous portez en vous ? Est-ce gagner de l’argent, et/ou empêcher autrui de s’attribuer un jour la paternité de votre œuvre ? Répondre à ces questions n’est pas si simple : vous pouvez parfaitement ne composer que pour le plaisir des oreilles amies (et les vôtres) et souhaiter quand même que votre création ne soit pas un beau jour utilisée sans votre accord. Pour avoir vécu une fois cette aventure, je vous assure que c’est désagréable ; c’est un peu comme si un inconnu venait renverser sa poubelle sur votre palier au seul motif qu’il pleut et que cela l’ennuie de sortir. L’occasion fait le larron (indélicat).
Vous pouvez aussi avoir la conviction que vos créations vont vous rendre célèbre. Si vous entendez vivre de votre musique, il est vital que vos symphonies, quatuors ou chansons ne soient pas diffusées hors de votre contrôle par un tiers peu scrupuleux. Si vous êtes certain de porter en vous un grand talent et que vous souhaitiez en vivre, ne remettez pas à demain ce que vous auriez dû faire hier : faites en sorte que vos créations soient protégées et qu’elles vous rapportent le plus vite possible ce qui vous est dû (pour voir si vous entrez déjà dans ce schéma, voyez plus loin).
Mais enfin, vous pouvez aussi estimer que la musique est simplement quelque chose de convivial qui se partage avec des personnes qui adhèrent aux mêmes valeurs ; vous pouvez aussi prendre conscience que des dizaines de milliers de musiques variées sont déjà mises à la disposition de chacun sur Internet, et que ce serait bien une vraie malchance que ce soit justement la vôtre qui soit victime d’un emprunt intempestif !
Vos goûts, votre ambition, votre talent, votre situation financière sont donc des ingrédients que vous devrez peser avec discernement. Ou bien, vous penserez ne devoir rechercher ni argent ni protection ; ou encore vous penserez qu’il est important de protéger vos musiques sans pour autant ambitionner d’en retirer de d’argent. Mais vous pouvez enfin souhaiter recevoir le beurre et l’argent du beurre, ambition parfaitement respectable !
Vous le savez, www.musiqueharmonie.fr , votre site, a fait le choix de la gratuité; c’est notre philosophie. Si vous êtes adhérent, vous pouvez télécharger gratuitement l’intégralité de nos compositions mises en ligne ; c’est notre joie de les partager avec vous. Cela ne signifie évidemment pas que vous puissiez vous les attribuer ou les utiliser sans notre accord !
Comment protéger votre musique ?
En général, vous pensez tout de suite Sacem. Vous avez tout à la fois tort et raison : le métier de la Sacem est de gérer collectivement les droits d’auteurs, c’est à dire de les collecter et de rémunérer les auteurs ayant déposé leurs œuvres chez elle. Elle vous informe sur les droits de diffusion et de reproduction de la musique. Son tout premier rôle n’est donc pas de prouver, s’il en est besoin, que vous êtes bien le compositeur de telle œuvre (preuve suffisante si votre but n’est pas d’abord de gagner de l’argent). Pour pouvoir vous inscrire à la Sacem en tant que compositeur de musique, l’une de vos œuvres doit déjà avoir été diffusée en public ou reproduite sur un support commercialisé. Si telle est votre situation et que vous désiriez profiter de la manne financière qui vous attend (et pourquoi en feriez vous cadeau ?), voici ce que vous devez faire :
Expédiez à la Sacem son formulaire d’inscription complété (disponible sur Internet : www.sacem.fr), accompagné de la photocopie de votre pièce d’identité, de deux photos, du manuscrit complet de l’œuvre que vous voulez déposer (ou de sa reproduction sur CD), ainsi que d’une cotisation de 113 Euros (due une fois seulement). Pour plus de détails, voyez le site. Des points spécifiques concernent chaque profession susceptible de faire protéger une création : ainsi un compositeur de musique doit joindre à son dossier une attestation de diffusion établie à votre demande par l’organisateur du concert, par la radio ou la télévision qui a diffusé votre œuvre …
Ce n’est pas votre cas? vous galérez justement pour parvenir à voir votre premier CD vendu, ou bien pour intéresser un organisateur de concert? La Sacem n’est pas la solution pour vous, mais il y a en a d’autres. En voici trois.
La première est quasi gratuite : éditez votre partition ; pliez en les feuilles, et scotchez le pourtour de façon à ce que votre partition supporte un voyage postal sans se décomposer. Expédiez la à votre adresse, en recommandé avec accusé de réception. Si besoin est, vous disposerez d’une preuve de l’antériorité (cachet de la poste) de votre composition.
La seconde n’est pas trop onéreuse et se pare de l’onction d’un Officier Ministériel : éditez votre partition, et déposez là auprès d’un notaire ou d’un huissier de justice (il la gardera dans son coffre). La encore, vous pourrez faire la preuve de vos droits sur votre œuvre si un individu à qui vous l’aviez expédiée en toute confiance venait à s’attribuer vos mérites.
La troisième est très sûre, bien adaptée à votre situation de compositeur, et facile à mettre en oeuvre : déposez votre partition auprès du SNAC (syndicat des auteurs compositeurs www.snac.fr). Vous pouvez facilement protéger vos créations pour une durée de 5 ans et un coût de 32 Euros (par enveloppe déposée). Une seule enveloppe vous permet d’expédier et donc de protéger de 1 à 4 créations. Vous n’êtes même pas obligé d’adhérer au syndicat (voir les détails de fonctionnement sur le site du Snac).
Jean-Pierre Nouvel