Le poête et fabuliste Oscar Mandel au coeur du récital MusiComposer.fr du 19 juin prochain en collaboration avec les éditions Bruno Doucey et les éditions de l’Herne.
Le poête et fabuliste américain Oscar Mandel est à la fête, en cette année 2010. Il figure en effet parmi les auteurs vedettes des toutes nouvelles Editions Bruno Doucey, dont le lancement officiel aura lieu le jeudi 27 mai à Paris, à la Mairie du IIême Arrondissement, à partir de 20h, dans le cadre des Périphériques du 28ême Marché de la Poésie. Bruno Doucey, ancien Directeur des Editions Seghers, suit et soutient depuis longtemps l’œuvre d’Oscar Mandel qui, en dehors de ses talents de poête et de fabuliste, est également l’auteur de piêces de théà¢tre et d’essais sur l’art et la littérature en anglais pour ces derniers. Oscar Mandel sera également au coeur du prochain concert organisé par MusiComposer.fr, le samedi 19 juin, à 19h, à l’Auditorium de la Cité Internationale des Arts de Paris (voir notre page « Nos Concerts »). Au cours de cette soirée, nous aurons l’occasion d’écouter les sopranos Ursula Barriêre et Clémence Gégauff, le ténor Pierre-Henri Ageorges et le Choeur de Chambre Artémisia, accompagnés au piano par Benoù®t Aguettant, interpréter des mélodies de Jean-Louis Foucart, Yves Rinaldi et John Sernee sur des fables et poêmes d’Oscar Mandel. Deux fables, tirées de « La Reine de Patagonie et son Caniche », éditées aux Editions de l’Herne, co-partenaire de l’évênement, et douze poêmes inédits, extraits du tout nouveau recueil intitulé « Cette Guêpe me Regarde de Travers », publié aux Editions Bruno Doucey, permettront de mieux pénétrer dans l’univers particuliêrement attachant de ce poête protéiforme qui se plait à naviguer entre plusieurs registres et sait allêgrement passer d’une ironie presque décapante à l’émotion la plus retenue.
La « Peinture Japonaise » qui suit matérialise avec les mots et leur sonorité poétique les impressions subtiles et vagues que suscite la contemplation du « Monde Flottant » propre aux peintures et estampes japonaises. Jean-Louis Foucart a mis en musique ce délicat poême qui sera interprétée le 19 juin prochain par la soprano Ursula Barriêre et le Choeur de Chambre Artémisia : UNE PEINTURE JAPONAISE Fillette au regard éloigné du nôtre
Que seuls aperçoivent
Trois arbres qui flottent au loin
Sur le nu d’une vaste neige. Les arbres sont nus et noirs.
Lui racontent-ils, de cette voix si noire,
L’ancienne humaine leçon
D’une perte sans retour ? Anciennes leçons
Que seuls les Maîtres ravivent :
La neige tombe, une enfant
Est perdue dans un bois. Restez, fillette, arbres, neige :
Enigme autrement digne, pour moi,
Que lignes et couleurs
Qui ne racontent que couleurs et lignes (Oscar Mandel, « Cette guêpe me regarde de travers » , éditions Bruno Doucey, Paris, 2010) La courte fable qui suit donne le ton quant à la propension d’Oscar Mandel à traduire avec humour les situations les plus dramatiques de la conditions humaine transposée dans un registre animalier, à l’instar de ses grands devanciers fabulistes. En intellectuel américain dont la culture est essentiellement d’obédience européenne, Oscar Mandel pratique l’art de la distanciation en évitant avec précaution de verser dans un larmoiement de bon aloi. C’est ainsi qu’il dépeint l’improbable dialogue entre un corbeau cynique mais lucide et un mendiant adepte du stoù¯cisme qui parvient en quelques mots à clouer le bec acéré de l’impertinent animal, piégeant ce dernier dans sa propre rhétorique narquoise : LE CORBEAU ET LE MENDIANT Loin de la route, dans un terrain vague semé de pierres et de ronces, tout seul, sa casquette à la main, se tenait un mendiant. Un vent glacial rampait d’un horizon gris à l’autre. Intrigué par ce spectacle, un corbeau atterrit dans les herbes à quelques pas de l’homme; – Mendiant, dit le corbeau, personne ne te donnera jamais rien dans ce désert. – Corbeau, répondit le mendiant, personne ne me refusera rien dans ce désert. (Oscar Mandel, « La reine de Patagonie et son caniche » , éditions de l’Herne, Paris, 2007) Ce « Corbeau et le mendiant » sera chanté par la soprano Clémence Gégauff et le Choeur de Chambre Artémisia, sur une musique de John Sernee.
Pour comprendre l’œuvre d’Oscar Mandel, il faut interroger l’homme, mais comme on découvrirait son image dans l’eau : à vouloir trop s’en approcher on en vient à troubler la fragile surface et à brouiller l’image qui s’y reflête. Car Oscar Mandel ne se révêle pas à ceux qui n’ont que leurs yeux pour voir. Né en 1926 à Anvers, Oscar Mandel, issue d’une lignée de diamantaires belges d’origine juive allemande, fut obligé de fuir la menace nazie et de traverser la France puis l’Espagne, avec sa famille, avant d’embarquer pour les USA, où¹, devenu américain, il grandit, fit ses études et mena sa carriêre littéraire et universitaire, enseignant notamment la littérature dans le prestigieux institut universitaire de technologie CalTech de Los Angeles, ville où¹ il réside avec son épouse Adrianna, elle-même universitaire et chercheur spécialisé dans la littérature et le théà¢tre espagnol et italien des XVIe et XVIIe siêcles. Mais que nous dit donc le miroir d’eau lorsque le poête s’y regarde ? Il nous révêle un auteur dépourvu de tout narcissisme, à la différence du berger d’Ovide : jamais Oscar Mandel ne sombre dans la contemplation de sa propre création et son écriture prend souvent des détours arides et laconiques pour mieux nous faire sentir une sensibilité sous-jacente qui n’en est que plus authentique. Nulle emphase ni boursouflure dans ces agencements de mots qui suggêrent plus qu’ils n’énoncent. Le lyrisme du poête se pare souvent des atours de l’austérité sans jamais sombrer dans l’indigence. Ce três court poême, troisiême du cycle de «L’Amoureux », en fournit une bonne illustration. L’ensemble du cycle, mis en musique par Yves Rinaldi, sera interprété par le ténor Pierre-Henri Ageorges et le Choeur de Chambre Artémisia, le 19 juin prochain : L’AMOUREUX INQUIET Trois jours d’absence, et dans cette cuillerée d’heures
Mugit un océan de peurs. (Oscar Mandel, « L’Amoureux », in « Cette Guêpe me Regarde de Travers » , Editions Bruno Doucey, Paris, 2010) En quelques mots, le poête traduit l’angoisse de l’amoureux en proie aux affres de l’incertitude et de l’attente. Sans fioriture, les mots nous renvoient au coeur de notre propre fragilité face à cet autre tant désiré et pourtant insaisissable. Et le vertige existentiel qui s’ensuit devient sous la plume du poête un « océan de peurs », flot indomptable qui peut nous engloutir lorsque l’on s’y abaîme, tout comme l’amour à la folie noie la raison. En quelques mots, tout est dit : l’absence, le temps qui semble s’étirer interminablement, transformant quelques « cuillerées d’heures » sans l’être aimé à ses côtés en un engloutissement d’incertitudes, surgi du plus profond de soi. Ainsi, quiconque serait tenté par une lecture biographique de l’œuvre d’Oscar Mandel, se trouverait bien vite décontenancé. Certes, l’on peut repérer l’esthête nord européen de souche, fin connaisseur de peinture flamande et féru de la musique de Bach, polyglotte talentueux, capable d’écrire en anglais, sa langue d’adoption, en français, sa langue de prédilection ou encore de parler le flamand et l’allemand, langues rattachées à ses origines. Mais son regard le porte également vers la Chine, pour la culture de laquelle il voue une grande admiration doublée d’une grande érudition. Dans son conte Chi Po et le Sorcier (2004, Editions de L’Herne), l’auteur nous plonge dans une Chine légendaire, au coeur d’un de ces innombrables petits villages chinois perdus dans l’immensité des montagnes de l’Empire du Milieu, pour nous faire découvrir, avec un humour attachant, quelques personnages typiquement chinois mais aussi universels, par certains de leurs traits de caractêre auxquels nous pouvons aisément nous identifier. Certes, l’auteur californien réside une bonne part de l’année à Paris et s’y sent bien, une part de son œuvre ayant été rédigée en français et publiée par des éditeurs parisiens. Cependant, les essais consacrés par lui à la culture et à l’art européens ne concernent que três peu la France et touche davantage aux domaines flamand, allemand et italien. Et pourtant, entre Rome l’italienne et Paris la française, c’est dans la seconde qu’il préfêre résider. Mais, pour achever de brouiller les cartes, son cours à CalTech a la littérature américaine et anglaise pour thématique essentielle. Oscar Mandel représente donc plutôt bien cette catégorie d’intellectuels américains ouverts vers des horizons culturels dépassant le domaine des Etats-Unis. C’est d’ailleurs à cela que l’on reconnaît la spécificité de l’élite intellectuelle américaine : elle sait parfaitement cultiver la diversité dans la retenue, sans artifice et se méfie du dogmatisme aliénant des « écoles » et autres mouvements d’avant-garde en « -isme » dont le siêcle dernier, surtout en Europe, a pourtant été si fécond, jusqu’à la nausée. Ainsi tout l’intéresse, de ce qui est de l’ordre de l’esprit et des humanités, et ce véritable « honnête homme », comme on aurait dit au XVIIIe siêcle, sait relativiser les enjeux des débats qui agitent les cénacles intellectuels du moment, dont il se tient à bonne distance. Aux postures pseudo intellectuelles à la mode, Oscar Mandel préfêre l’humour piquant d’une (auto)dérision pudique. En effet, qui pourrait s’imaginer que derriêre des titres aussi peu métaphysiques ou philosophiques que « La Reine de Patagonie et son Caniche» ou « Cette Guêpe me Regarde de Travers », se cachent des recueils pétris d’humanité et d’une profonde gravité, celle qui se médite dans le silence des souvenirs et des sentiments surgis d’entre les mots. La seule qui vaille réellement. Yves Rinaldi
– Le jeudi 27 mai, 20h,
Salle des Expositions de la Mairie du IIe Arrondissement de Paris,
8, rue de la Banque 75002-PARIS, Métro Bourse : Soirée inaugurale des éditions Bruno Doucey
avec notamment la présentation publique du dernier recueil de poêmes d’Oscar Mandel :
« Cette Guêpe me Regarde de Travers » (Editions Bruno Doucey, Paris, 2010).
Auteurs présents : Oscar Mandel, Jeanine Baude, Salah Al Hamdani, James Noù«l et Fulvio Caccia.
Avec la participation du comédien Claude Aufaure et du musicien Christophe Rosenberg. invitation – Le samedi 19 juin, 19h,
Auditorium de la Cité Internationale des Arts de Paris,
18, rue de l’Hôtel-de-Ville 75004-PARIS, Métro Pont-Marie-Cité-des-Arts: Récital Oscar Mandel organisé par MusiComposer.fr en partenariat avec les Editions Bruno Doucet et les Editions de L’Herne. Å’uvres de Jean-Louis Foucart, Yves Rinaldi et John Sernee sur des fables et poêmes d’Oscar Mandel. Ursula Barriêre, soprano ; Clémence Gégauff, soprano ; Pierre-Henri Ageorges, ténor ; Benoù®t Aguettant, piano ; Choeur de Chambre Artemisia.
Je confirme : Oscar Mandel est un homme d’un abord simple, chaleureux, attachant, plein d’humour. Il me fait penser à Jacques Prévert, que j’ai un peu connu (musicomposer.fr/themes/Ca…
Mettre ses poèmes en musique fut pour moi l’occasion de le rencontrer, en même temps qu’un exercice passionnant.