Pour répondre à cette 3e question de notre quiz harmonie N°4, nous rappellerons d’abord les différentes fonctions d’une bonne orchestration. En effet, là où¹ le béotien ne voit qu’une mélodie avec son accompagnement, l’orchestrateur distingue:
- une basse
- un 1er accompagnement
- un 2e accompagnement
- une résonance
- des accents, des touches
- une structure rythmique.
Résonance , accents et touches ont été définis précédemment. Pour la définition des lignes de basse, 1er et 2e accompagnements, se reporter aux 20 leçons d’harmonie chap. 1, fig.4 notamment. Grand et petits tutti, quelle différence?
En gros, c’est la présence des cuivres qui différencie le grand du petit tutti.
Mais plus précisément, c’est la façon d’organiser les tutti, c’est à dire de distribuer les groupes d’instrument, cordes, bois, cuivres, entre les différentes fonctions qui est intéressante.
Schématiquement, il existe deux procédés: la doublure des voix ou leur répartition entre les groupes instrumentaux. On distingue traditionnellement deux écoles en orchestration suivant que l’un ou l’autre procédé est employé (distinction traditionnelle mais simpliste puisque on trouve autant d’exemples que de contre-exemples de part et d’autre). Dans l’école franco-russe (rien à voir avec l’entremets, par contre on juge là de l’influence mutuelle des musiques française et russe), chaque fonction est attribuée à une seule famille d’instrument. Ainsi, grà¢ce à des timbres caractéristiques, tout ressort clairement. Exemple: Tchaikovsky, Symphonie no 5, Final, mesure 474 et suivantes : Pendant que les cordes jouent la mélodie principale en octave, les cors et les bois exécutent un important double accompagnement contrapuntique. Des notes répétées, confiées aux cuivres graves et aux contrebasses, complêtent le tout. Exemple: Debussy, 2e Nocturne « Fêtes »: chaque groupe d’instruments a sa partie instrumentale sans aucune doublure du début à la fin de la piêce. Exemple: Mozart, final de la symphnonie N°35 (« Hafner »): musique avec trois parties. Mélodie et contrepoint assurés par les violons, plus un dialogue rythmique par les bois et cuivres donnent un tutti « musclé ». Exemple: Malher: Final de la symphonie Titan: les violons jouent dans le haut du spectre sonore pour ne pas être masqués par les cuivres, três puissants dans le medium. Dans l’école allemande, largement illustré par Schuman, Brahms, Wagner, toutes les familles instrumentales doublent plus ou moins intégralement chacune des parties, depuis les violons et le piccolo jusqu’aux contrebasses, tuba ou contrebasson. L’unité harmonique assure la cohérence de l’ensemble. La doublure généralisée telle que la pratique Schuman conduit à une sonorité riche, homogêne qui convient à sa musique três « intérieure ». Mais ailleurs elle peut devenir rapidement monotone et grise si le compositeur ne donne pas une certaine indépendance dans le détail à chacune des parties de l’orchestre pour créer ainsi de subtiles touches de couleur. Exemple:Mozart: Le tutti du mouvement lent du Concerto pour clarinette: l’orchestre reprend in extenso le thême exposé d’abord par la clarinette, un peu comme l’on jouerait ces nuances au piano, d’abord piano, puis forte. D’aprês Jean-François Zygel, ce tutti de Mozart serait l’un des premiers observés en musique orchestrale. Exemple: Wagner, Les Maîtres-Chanteurs, début du Prélude : Chaque famille expose des parties indépendantes. Les bois commencent en doublant la mélodie principale des violons, dês la mesure 7 mais ils ajoutent rapidement des détails de leur cru. Exemple: Brahms, double concerto (extraits 1er et 3e mouvements) : on admirera la cohérence et l’homogénéité de l’orchestration qui résultent de l’emploi des doublures de tous les instruments dans toutes les voix. Nota: comme il s’agit d’un concerto, la diversité est assurée ici par les solistes.